Joachim Garraud
A l'occasion de l'Elektric Park Festival 2022, Joachim Garraud a accepté de se livrer à notre équipe sur sa carrière aux multiples facettes.
Est-ce que tu peux te présenter pour ceux qui ne te connaissent pas ?
Alors est-ce que tu as 1h40 ? (rire) Je m'appelle Joachim Garraud, je suis producteur de musique, producteur de festival, artiste, DJ, cuisinier, jongleur et passionné de musique depuis 35 ans. C'est difficile de tout résumer en quelques mots mais passionné de musique c'est bien je trouve.
Tu fais partie des pionniers et des précurseurs de la musique électronique à coté d'autres artistes très réputés. Voila maintenant près de 35 ans que tu as démarré ta carrière oÀƒÂ¹ tu as eu la chance de travailler avec David Guetta. Comment as-tu vécu ces années de collaboration avec lui ?
C'était super, j'adore travailler avec pleins d'artistes différents que ce soit Bob Sinclair, Jean-Michel Jarre, David Guetta ou des artistes moins connus. Moi j'aime bien le partage, j'aime bien travailler dans des projets de duos. Alors après qu'est ce que ça m'a apporté ? Ca m'a apporté de la notoriété c'est vrai parce que quand tu fais des tubes et que tu composes des chansons qui sont diffusées à travers le monde, ça me permet de gagner de l'argent et donc de produire des choses, d'investir dans des groupes différents qui peut-être en gagnent moins, de faire plein de projets à la fois. Puis ça m'a permis de vivre de la musique et de m'éclater surtout, d'écrire de belles chansons, de produire des trucs supers et de rencontrer des artistes incroyables.
ndlr : Joachim Garraud a notamment fondé le label F*** me I'm Famous avec David Guetta en 2005, composé de nombreux titres pour lui comme À¢Â€ÂœMoneyÀ¢Â€Â, "Just A Little More Love", À¢Â€ÂœLove Don't Let Me GoÀ¢Â€Â ou encore co-produit son album À¢Â€ÂœGuetta BlasterÀ¢Â€Â
Tu es également l'un des précurseurs de ce qu'on peut appeler aujourd'hui des À¢Â€Âœlive setsÀ¢Â€Â. C'est un mélange de musique et de mix en live notamment avec ta curieuse guitare, comment t'es venu l'idée de lancer ce type de prestations ?
Alors déjà je vais vous donner un terme ça s'appelle À¢Â€ÂœkeytareÀ¢Â€Â parce que c'est la contraction d'une guitare et d'un keyboard. Comment l'idée m'est venue ? Et bien c'est assez simple, j'ai la chance d'avoir eu une formation classique de musique. J'ai appris la musique au conservatoire donc je suis musicien, je joue un peu de piano et des percussions.
Quand j'ai commencé à être DJ et voir que les DJ changeaient un petit peu de statut, c'est à dire qu'on n'était plus des gens qui étaient à la cave dans le noir ; on était de plus en plus sur scène. Les gens venaient nous voir, on n'était plus dans la lumière, on était un peu plus des artistes et moins des passeurs de disques. Quand j'ai vu ça je me suis dis : il faut que je fasse la différence avec les autres DJ alors qu'est-ce qui fait la différence ? Tu joues des titres à toi ! C'est là oÀƒÂ¹ j'ai commencé à produire des titres persos. Je me suis dit, surtout ce que je veux, c'est faire une connexion directe avec le public. Comme je ne suis pas chanteur, je vais jouer de la musique et je me suis dis : À¢Â€Âœje vais sortir un instrument assez visible, très spectacleÀ¢Â€Â. J'ai donc commencé à jouer avec le keytare et ça a été ma marque de fabrique. Et d'ailleurs ce soir, je vais encore jouer du keytare parce que c'est vraiment MA marque de fabrique.
Il y a maintenant 12 ans que tu as lancé l'Inox Park qui est devenu l'actuel Elektric Park. Pourquoi t'es-tu lancé dans cette grande aventure de faire un festival ?
J'habitais a Chatoux en 2010 et je venais faire du vélo avec mes enfants sur l'ÀƒÂ®le des impressionnistes et je trouvais l'ÀƒÂ®le super. Je revenais d'une tournée en Australie et là-bas c'était essentiellement des festivals de journée, c'était de midi à minuit. Je me suis dit que c'était quand même dommage qu'en France il n'y ai pas de festivals de journée en musique électronique car ce n'est que des festivals de nuit. Donc je suis allé voir le maire de Chatoux et je lui ai dit À¢Â€Âœest ce que ça vous dérange de me laisser à disposition l'ÀƒÂ®le de Chatoux une journée par an et je vais faire une fête avec des copainsÀ¢Â€Â il m'a dit À¢Â€Âœok pas de problèmeÀ¢Â€Â. Il m'a fait confiance et on a fait une fête qui a démarrée comme ça, une fête improvisée entre amis.
Je n'aurais jamais imaginé que je ferais 12 éditions. Je pensais qu'on en ferait qu'une ! La première édition, on a fait un peu moins de 10 000 personnes c'était super. Et je me suis dit : on va faire la même chose l'année d'après et donc on a grossi et aujourd'hui, c'est vrai que c'est 12 années, c'est 30 000 festivaliers, c'est deux jours, c'est 5 scènes en simultanées. Ce n'est plus le même format qu'en 2010 mais l'état d'esprit est le même. Ce sont des fêtes de journée oÀƒÂ¹ on vient se balader dans un parc bucolique et écouter de la musique électronique, danser sur des DJ avec différents styles de musiques et découvrir de nouveaux artistes. Je suis très content qu'on ai perduré et que toute l'équipe me suive depuis des années.
On était à Fouras pour la première édition du À¢Â€ÂœRoad to EPKÀ¢Â€Â oÀƒÂ¹ tu nous a énormément surpris avec cette scène mobile, est ce que tu peux nous détailler un peu ce qu'attendent les Français dans les mois à venir avec ce concept ?
"Road to EPK" c'est un concept d'une scène mobile comme tu l'as très bien expliqué. Il y a quelques mois on a acheté un plateau d'une semi et on l'a aménagé en scène mobile un peu à la Transformers. L'idée c'était d'avoir un camion qui nous permet d'aller n'importe oÀƒÂ¹ et en trois heures de déplier une scène gigantesque, avec du son, de la lumière, de la vidéo, des lasers et des flammes. Il fallait pouvoir avoir un très bon son et faire des supers soirées avec un gros système de production et le lendemain replier le tout et hop disparaitre. Ca fonctionne super bien et l'idée c'est de faire une tournée À¢Â€ÂœRoad to EPKÀ¢Â€Â.
On va aller se balader en France et même en Europe avec ce camion, cette scène et aller produire des fêtes dans des lieux dingues. Je cherche en ce moment des lieux incroyables. Je veux des lieux oÀƒÂ¹ on n'a pas l'habitude de faire la fête parce que c'est ça qui m'excite. C'est d'aller dans des châteaux, dans une base sous-marine, je dis n'importe quoi, mais aller dans des parcs magnifiques, aller près d'un pont ou d'un viaduc, là oÀƒÂ¹ les gens sont déjà dans un état d'esprit parce qu'ils sont dans un lieu magnifique. C'est ça À¢Â€ÂœRoad to EPKÀ¢Â€Â !
Autre chose que tu as monté c'est ton bus solaire "LA Good Vibe" qui est en fait un studio fonctionnant à l'énergie renouvelable. C'est quoi l'idée, l'objectif derrière ce bus ?
J'ai eu la chance de monter un studio aux Etats-Unis, un studio solaire qui est le premier studio solaire mobile dans un bus américain que nous avons entièrement refait avec mon ami Charles et maintenant j'ai un studio d'enregistrement mobile qui fonctionne à l'énergie solaire. L'idée derrière tout ça, c'était de combiner le voyage, d'aller dans des lieux incroyables, au milieu du désert oÀƒÂ¹ il n'y a personne et d'avoir une énergie infinie qui permet de produire et d'utiliser l'énergie du solaire pour convertir ça en création musicale. Ca existe, ça s'appelle À¢Â€ÂœLA Good VibeÀ¢Â€Â et j'accueille des artistes et je les emmène dans des lieux incroyables.
On fait des vidéos clip, on fait de la musique, on fait tout ça dans des conditions dingues et tout ça grâce à l'énergie solaire avec une empreinte carbone réduite. J'adore ce projet car quand je suis au milieu du désert ou dans des endroits comme le grand canyon ou près d'un impact de météorite, tu te retrouves à être face à ces éléments oÀƒÂ¹ tu te sens tout petit, tu te sens comme une petite merde et ça booste la création.
C'est justement au cÅ“ur de ce désert californien que tu as créé ton nouveau projet À¢Â€ÂœAvoriazÀ¢Â€Â avec DeLaurentis. Est ce que tu peux nous parler rapidement de ce projet avant de le présenter ce soir pour la première fois au public ?
Oui, alors j'étais très content de rencontrer DeLaurentis, la productrice et chanteuse avec qui j'ai décidé de faire un duo qui s'appelle À¢Â€ÂœAvoriazÀ¢Â€Â, un peu à la À¢Â€Âœfuture raveÀ¢Â€Â. Je voulais mélanger mon côté masculin/techno/dark et le côté féminin un peu plus aérien de DeLaurentis et nos deux univers se mélangent très très bien. C'est vrai qu'on a fait 8 titres en très peu de temps parce que ça se passe très bien entre nous, les idées fusent et ça va super bien. Et donc, comme on avait beaucoup de titres, on va faire un live et faire ça sur la scène d'EPK. C'est quand même incroyable de se dire qu'un nouveau groupe, avec des nouveaux titres que les gens ne connaissent pas va faire sa première dans un festival avec 20 000 personnes, c'est juste génial !
On te voit tourner un peu partout en France, que ce soit dans une caserne de pompiers a Perpignan, ou alors a New York en plein cÅ“ur du central park pour le National Day, comment vis-tu ce rythme de vie et as -tu une anecdote à nous raconter sur une de tes dates ?
Tu sais, ma vie n'est qu'anecdote ! (rires) Après le rythme de vie se passe très bien. J'ai toujours adoré la musique et mon rapport à la musique est vraiment passionnel. L'été c'est spécifique parce qu'il y a beaucoup de festivals qui s'enchainent, en hiver on passe un petit peu plus de temps avec la famille mais après c'est une histoire d'organisation, on peut faire les deux ! Mais il faut s'organiser, il faut regarder le calendrier.
Pour les anecdotes, en 2011 je jouais à Chicago dans un festival devant 80 000 personnes qui s'appelle Awakening Festival. Je me retrouve à jouer juste avant un DJ que je ne connaissais pas et qui s'appelle Skrillex. Je vois ce mec qui joue et je me dit : À¢Â€Âœmais toi tu es un extraterrestre c'est dingue !À¢Â€Â A la fin de son set je vais le voir et je lui dis À¢Â€Âœécoute, ce qu'il faut que tu fasses c'est que tu viennes à mon festivalÀ¢Â€Â. Et il me répond À¢Â€Âœje suis jamais venu à Paris !À¢Â€Â. À¢Â€ÂœTrès bien, viens à l'EPK!À¢Â€Â. Et donc la même année, il y a eu Skrillex, Steve Aoki, Avicii et c'était la première fois qu'ils venaient en France. C'était une sacré anecdote pour les parisiens et pour les français qui ont découverts ces artistes qui sont devenus très très connus après. Mais je trouvais ça super qu'ils les découvrent sur l'EPK.
Ca fait 35 ans que tu es dans le milieu. Comment tu trouves l'évolution de la musique électronique depuis tes débuts ?
Elle est géniale ! Quand j'ai commencé, on était dans l'underground, on était bannis, on était des drogués À¢Â€Â¦ Aujourd'hui non, on est respectés, on peut monter des festivals, on a des marques qui nous suivent, on a beaucoup plus d'argent qui nous permet de produire des festivals ! Et je fais le tour du monde, c'est juste incroyable donc l'évolution est parfaite .
Pour finir, as-tu un dernier mot à dire à nos abonnés ?
Merci de supporter tous les styles de musiques. Je sais que vous êtes plutôt sur la Hardmusic et que c'est vraiment votre secteur de musique mais merci de parler de l'EPK tous les ans parce qu'on a une scène qui essaye de faire de plus en plus de place à ce genre de musique et avoir des spécialistes comme vous qui nous accompagnent c'est génial.
Un grand merci à Joachim Garraud pour cette interview. Vous pouvez aller le suivre sur Facebook et Instagram pour ne pas manquer toute son actualité.